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màj : 02/03/2016 11:30
Traction mécanique
sur les voies navigables
- annexe (2 - 3) -
Aux U.S.A.
Système Clarke-Gérard
Ce sytème a été implanté aux USA et il était constitué d'un tracteur aérien sur poutre métallique. Sa description figure au début de la page 19 - Hors sol.
Miami and Erie canal
Ce canal ne relie pas la capitale de la Floride au lac Eriè, mais seulement la ville de Cincinnati à Toledo sur le lac Erié. Il est situé entièrement dans l'état de l'Ohio et tire son nom de la tribu d'indiens qui vivait là, Miami. C'est un canal de 407 km à petit gabarit comportant un bief de partage1 et 95 écluses. Les chutes cumulées sont de 170 m d'un coté et 132 de l'autre. Les bateaux sont proches du gabarit berrichon, 21,30 m sur 3,05 m chargeant à 70 t, le mouillage du canal est de 1,3 m. Créé vers 1825, en 1900 il était tombé en désuétude, supplanté par le chemin de fer. Un certain M Fordyce, déjà promoteur du canal Erié, obtint une concession de remise en état du canal et de l'installation d'un système de traction électrique. La concession ne se limitait pas à la traction mais comprenait aussi l'ensemble du transport, si bien que la compagnie contrôlait la totalité des activités du canal. L'essentiel des transports était celui du charbon de Pittsburg arrivant à Cincinnati par l'Ohio River (affluent du Mississipi) et à destination des nombreuses usines le long du canal, desservies par chemin de fer depuis l'abandon de la navigation laquelle se faisait précédemment par bateaux remorqués par des mules. La région, industrielle, comportait nombre de papeteries consommatrices de charbon. Le canal appartenait à l'état d'Ohio.
Bien loin du système de tracteur aérien, on choisit des tracteurs de 18 t circulant sur une voie normale (1,435 m) et alimentés en courant triphasé. Les rails étaient de dimension confortable de 35 kg au mètre. C'était la première installation de traction en courant triphasé aux États-Unis. L'affaire est qualifiée d'expérimentation dans la presse de l'époque. On ne connaît pas l'importance de l'investissement qui a du être considérable et on n'a jamais eu de recul pour connaître la rentabilité, Les travaux ont duré de 1901 à 1907 et, en 1913, une crue exceptionnelle de la rivière a détruit suffisamment d'installations et d'ouvrages de génie civil pour que le canal soit abandonné. Dans les années 1930 à 1935, la voie a été réutilisée temporairement pour y faire circuler un tramway, de Cincinnati à un lac proche.
L’alimentation électrique était très compliquée. La compagnie du canal n'avait pas de centrale de production d'électricité et achetait le courant à une compagnie d'électricité de Cincinnati, à un bout du canal. Pas d'autre point de livraison. La fourniture était en 4 000 V triphasé, 60 périodes par seconde (c'est la fréquence standard américaine). Dans une station de transformation de la compagnie du canal il était transformé en diphasé par la méthode Scott de branchement des transformateurs(2). Ce courant 2 phases servait à alimenter un moteur synchrone, ce qui garanti la constance de la vitesse de rotation, lequel faisait tourner un générateur triphasé produisant du courant de 390 V 25 périodes par seconde. (Ces basses fréquences ont l'avantage de minimiser les pertes par induction) Le courant était ensuite élevé à la tension de 33 000 V et transporté sur une ligne haute tension fixée sur le haut des poteaux longeant la voie ferrée au bord du canal. Tous les 19 km il était implantée une sous-station, comportant des transformateurs statiques alimentant la ligne de contact à la tension de 1 090 V, sous laquelle roulent les trolleys au bout d'une perche. Dans les tracteurs (que les américains appellent locomotives) il y avait des transformateurs statiques qui abaissaient la tension à 390 V, celle qui convient aux moteurs. Comme le canal traverse la ville de Cincinnati et que de nombreux obstacles sont proches des fils nus, par sécurité, on y abaissait la tension dans la ligne des trolleys à 200 V. Il fallait donc une commutation pour continuer d'alimenter correctement les moteurs. Bien sûr les démarrages étaient contrôlés par rhéostat.
La ligne des trolleys ne comportait que deux fils, la troisième phase étant sur le rail. Sur l'illustration ci-contre, la voie de 1,43 m et les poteaux portant, en haut la ligne haute tension triphasée et à mi-hauteur, des potences supportant deux phases moyenne tension. Sur l'illustration ci-contre on peut voir que les poteaux de ligne ont une autre allure que les nôtres en France.
La navigation a été rétablie sur le canal uniquement par la compagnie concessionnaire pour elle-même, tous les bateaux lui appartenant et construits spécialement. Les tracteurs étaient au nombre de 7 en 1903, mais il en était prévus d'autres, les travaux étant encore en cours à la publication de l'article, principale source de ces renseignements, tiraient des rames de 5 à 7 bateaux, à une vitesse comprise entre 4 et plus de 6 km/h, avec un tirage de 60 m et des remorques entre bateaux de même longueur. La puissance estimée pour tirer un seul bateau était de 10 ch. Les tracteurs étaient dotés de deux moteurs de 40 ch chacun. Ils ne tractaient que dans un seul sens malgré leur aspect boite à sel. La position du crochet de traction tout à l'arrière dans l'axe de la voie, transmettant un effort important, provoquait un couple de mise en travers qui était compensé (partiellement) par le grand empattement et la largeur de la voie1. On en déduit que les rayons de courbure de la voie étaient importants.
Passage de la voie de traction sous un pont de chemin de fer. Compte tenu de la hauteur des tracteurs la voie a du être abaissée au niveau de l'eau ou plus bas. On voit les deux fils d'alimentation électrique qui passent sous le tablier du pont. Les autres fils de la ligne passent au dessus de la voie de chemin de fer passant sur le pont. L'impression de voie ferrée le long d'un quai d'embarquement est fausse, le canal est derrière le muret en béton. Cette photo de 1903 a été scannée sur un journal de l'époque ce qui explique sa qualité insuffisante aujourd'hui mais excellente pour l'époque.
Le croisement de deux rames se faisait par croisement des tracteurs, ce qui ne pouvait se faire qu'à certains endroits où des voies d'évitement étaient ménagées. Le tracteur qui prenait la voie d'évitement décrochait son tirage et l'autre continuait tout droit. Ensuite celui de la rame qui était arrêtée - car on suppose qu'il y avait une attente puisque le point de croisement était imposé - reprenait son tirage posé au fond du canal et repartait. Les rames partaient à heures fixes afin que les attentes aux points de croisement puissent être minimisées. L'horaire était aménagé en tentant de croiser aux écluses. Cela avait l'avantage d'éviter les fausses bassinées puisqu'il y avait autant de bateaux montants que d'avalants.
Un point très étonnant était relatif au fait que la voie changeait de berge de temps en temps. Pour cela, on avait construit des ponts tournants sur lesquels la machine passait, puis dès qu'elle avait dégagé on ouvrait le pont pour laisser passer les bateaux. On manque de précisions sur les éventuels incidents puisque le pont ne devait s'ouvrir que très peu de temps avant l'arrivée du premier bateau de la rame(1).
Vue de l'entrepot de la compagnie à Cincinnati. Deux bateaux semblant identiques sont amarrés en attente ou en cours de chargement. Le nom de la compagnie (Miami & Erie canal transportation co) est inscrit sur le tableau arrière. Curieusement ils sont couverts et les écoutilles, s'il y en a, ne sont guère visibles. Pas de grue, l'accés des marchandises se fait par des portes juste au bord du quai. Or le charbon était l'essentiel des marchandises transportées (en sacs ou bien avec un autre type de bateau et un autre quai ?).
La navigation fonctionnait 24 sur 24 avec des horaires établis à l'avance. Toutes les personnes concernées étant employées par la compagnie du canal. Les horaires mentionnent, par exemple, une rame partant chaque jours à 17 heures de Cincinnati et arrivant à 5 heures le lendemain matin à Hamilton à une distance d'environ 50 km, soit une vitesse moyenne de 4 km/h. On note un trafic de 100 bateaux par jour dans cette section proche de Cincinnati. On (l'auteur de l'article) prétend que le passage des bateaux aux écluses durait 8 minutes en moyenne et même 4 quand les conditions étaient optimales. L'organisation de l'exploitation était calquée sur celle du chemin de fer. Un poste de contrôle central relié par téléphone avec tous les ports et points particuliers gérait l'ensemble. Les tracteurs étaient équipés de téléphones embarqués qu'on pouvait relier au réseau filaire aux points d'évitement équipés, sans personnel permanent, le conducteur s'arrêtait et branchait une prise sur le tracteur pour se connecter. Les deux réseaux, téléphone de dispatching et du téléphone opératoire avaient été réalisés par la Kellog Switchboard & Supply Co de Chicago.
Le tableau ci-dessous montre les horaires des rames en 1903 dans la partie du canal en service à ce moment.
CINCINNATI à
LOCKLAND
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CINCINNATI à
HAMILTON
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Départ
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Cincinnati
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12 H 00
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Départ
|
Cincinnati
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17 H 00
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Arrivée
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St Bernard
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14 H15
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Arrivée
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Lockland
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8 H 30
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Edgemont
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15 H15
|
Crescentville
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0 H 00
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Elmwood Place
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Rialto
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1 H 30
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Carthage
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Port Union
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2 H 30
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Hartwell
|
15 H30
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Mosler
|
4 H30
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Maplewood
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Hamilton
|
5 H 00
|
Lockland
|
16 H00
|
LOCKLAND à
CINCINNATI
|
Reading
|
Départ
|
Lockland
|
12 H 00
|
Wyoming
|
Reading
|
HAMILTON à
CINCINNATI
|
Wyoming
|
Départ
|
Hamilton
|
15 H 00
|
Arrivée
|
Hartwell
|
13 H 30
|
Arrivée
|
Mosler
|
17 H 30
|
Maplewood
|
Port Union
|
19 H 30
|
Carthage
|
13 H 45
|
Rialto
|
20 H 30
|
Elmwood Place
|
Crescentville
|
22 H 00
|
Edgemont
|
Lockland
|
1 H 30
|
St Bernard
|
14 H 45
|
Cincinnati
|
5 H 00
|
Clifton Springs
|
15 H 30
|
|
|
|
Cincinnati
|
17 H 00
|
La précision est remarquable mais elle est théorique et on ne sait pas comment elle était respectée. Toutefois pour assurer un croisement correct aux endroits aménagés une certaine rigueur était nécessaire.
A Cincinnati certaines marchandises, dont le charbon venaient par la rivière Ohio. Or l'extrémité du canal n'était pas navigable sur une petite distance au débouché. Un transport par chemin de fer avec double transbordement était nécessaire. Malgré cela le coût du transport par bateaux était plus faible que par le chemin de fer, lui-même plus faible qu'avec des mules sur le halage. Le gain se faisait essentiellement sur l'énergie dépensée.
notes
1 - Quel marinier ne serait pas inquiet de voir un pont tournant ne commencer à s'ouvrir qu'à 60 m de son nez ? En sus il y avait plusieurs autres bateaux en remorque, peut-être le dernier avait t-il un dispositif de freinage d'urgence. Le rédacteur de l'article source fait comme s'il n'avait pas connaissance d'un pont en panne subite. Mais il faut admettre que le matériel était tout récent et n'avait peut-être pas encore eu de problème.
2 - Deux phases à 90° au lieu de trois à 120°. L'ignorance de ces détails ne nuit pas à la compréhension du fonctionnement, il est seulement intéressant de savoir (si on a quelque interêt pour la chose) que les débuts de l'électronique de puissance ont été compliqués.